Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada
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Ancien lauréat
Prix postdoctoral Howard-Alper du CRSNG de 2003

T. Ryan Gregory

Biologie

University of Guelph


T. Ryan Gregory
T. Ryan Gregory

T. Ryan Gregory sait que tout est une question de taille. La taille du génome, s'entend. Mais il reste à comprendre pourquoi.

« Pourquoi certaines salamandres ont-elles 20 fois plus d'ADN que vous et moi? », se demande Ryan Gregory, titulaire depuis peu d'un doctorat de l'University of Guelph et lauréat du prestigieux Prix postdoctoral Howard-Alper 2003 du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG).

Bien des chercheurs se sont penchés récemment sur le séquençage du génome. Mentionnons notamment le projet de cartographie du génome humain, publié en 2001, qui a fait date. Le génome renferme l'ensemble de l'ADN porté par les chromosomes d'une espèce particulière. Mais les travaux sur le séquençage de l'ADN ont amplifié une énigme de longue date. On sait depuis les années 50 qu'il n'existe aucun rapport évident entre la complexité d'un organisme et la taille de son génome (aussi appelée « valeur C »), comme en témoigne la différence entre la salamandre et l'être humain. Il semble que les organismes simples peuvent avoir un génome beaucoup plus grand que les organismes complexes. Cette constatation était tellement contraire aux hypothèses que l'on parlait, au milieu des années 70, du « paradoxe de la valeur C ».

Ce « paradoxe » a été résolu lorsqu'on a découvert l'ADN non codant, parfois appelé « ADN égoïste ». À peine 1,5 p. 100 environ de notre ADN est composé de gènes – les brins d'ADN qui codent pour les protéines. Les 98,5 p. 100 restants n'ont aucune fonction codante. Toutefois, cette découverte n'a fait que soulever une énigme beaucoup plus complexe, que M. Gregory appelle « énigme de la valeur C ».

« Nous ne comprenons pas encore les mécanismes qui régissent le gain et la perte d'ADN non codant au cours de l'évolution, et ne savons pas si cet ADN non codant a des effets biologiques, voire s'il remplit des fonctions biologiques, ni pourquoi certains organismes en ont autant dans leur génome, tandis que d'autres ont des chromosomes remarquablement simples », explique M. Gregory, qui est pourtant l'un des pionniers dans l'étude de la signification de la taille du génome sur le plan de l'évolution.

Pendant les recherches de doctorat qu'il a menées à l'University of Guelph avec M. Paul Hebert (qui ont éveillé son intérêt pour la taille des génomes), M. Gregory a réuni les études publiées pour compiler la base de données la plus importante du monde sur la taille des génomes animaux. Cette collection en ligne (http://www.genomesize.com), qui présente le génome d'environ 3 000 animaux, est devenue une ressource essentielle pour les scientifiques du monde entier. Elle est consultée jusqu'à 50 fois par jour.

À partir de cette base de données, M. Gregory a procédé à la première analyse statistique de vastes ensembles d'information sur la taille du génome en tentant de dégager les grandes tendances. Il l'utilise aussi pour établir des comparaisons entre la taille du génome et des éléments tels que la taille des cellules et du corps, le taux de développement et la vitesse de métabolisme. Par exemple, la plus grande partie d'un génome peut influer sur le taux de division cellulaire et, par le fait même, sur le taux de développement.

En créant la base de données, M. Gregory a constaté que le manque flagrant d'information sur la taille du génome des invertébrés constitue l'une des grandes lacunes de la génomique comparative actuelle. En effet, bien que les espèces invertébrées soient beaucoup plus nombreuses, ce sont les données se rapportant aux espèces vertébrées qui sont deux fois plus nombreuses.

Dans le cadre de ses travaux de recherche de doctorat, M. Gregory a utilisé une nouvelle technique informatisée d'analyse d'images (qui permet d'évaluer plus rapidement et à un coût nettement moindre la taille d'un génome) dans le but de combler cet écart sur le plan de la taxonomie. Il a déterminé la taille du génome d'environ 400 espèces invertébrées non étudiées auparavant, par exemple, des insectes, des araignées et des vers de terre. À l'heure actuelle, il poursuit ses travaux sur le génome des invertébrés en tant que titulaire d'une bourse postdoctorale du CRSNG à l'Institute for Comparative Genomics (ICG) de l'American Museum of Natural History, en collaboration avec une équipe dirigée par M. Rob DeSalle.

L'objectif à long terme de Ryan Gregory consiste à exploiter ces immenses bases de données sur le génome, de même que les nouvelles données échantillonnées à partir d'un large éventail d'animaux, et des concepts provenant de domaines aussi variés que la biologie cellulaire, la physiologie et la paléontologie, pour aider à résoudre une énigme biologique qui reste inexpliquée depuis plus d'un demi-siècle.