La plupart des gens qui vivent et travaillent dans les villes ne sont probablement pas au courant que les nombreuses surfaces solides qui les entourent – comme les fenêtres et les façades d'immeubles – sont en réalité d'immenses réacteurs chimiques qui peuvent influer sur la toxicité et la persistance des polluants atmosphériques. Bien que les scientifiques connaissent depuis longtemps l'existence de ces réacteurs chimiques, aussi appelés saleté urbaine ou films de surface, on ne sait que peu de choses sur la façon dont ils fonctionnent.
De nouvelles connaissances approfondies sur la saleté urbaine commencent à émerger des expériences effectuées par Sarah Styler, chimiste de l'environnement à la University of Toronto. Avec l'aide du Prix d'études supérieures André-Hamer du CRSNG au niveau de la maîtrise, elle est arrivée à une meilleure compréhension du rôle de la lumière solaire dans le déclenchement des réactions chimiques entre la saleté urbaine et le large éventail d'oxydants contenus dans l'air de la ville.
« Les surfaces urbaines sont d'énormes milieux de réaction chimique dont les scientifiques qui modélisent les polluants atmosphériques tiennent rarement compte. Elles forment un environnement complexe qui n'a pas vraiment été beaucoup étudié jusqu'à présent. Toutefois, nous savons que l'on ne peut pas prévoir la toxicité et la persistance d'un composé chimique dans l'environnement si l'on ne prend pas ces énormes surfaces urbaines en considération », explique Mme Styler.
La saleté urbaine se forme lorsque des composés chimiques peu volatils, tels que les produits de combustion oxydés provenant des véhicules, se condensent en couche mince sur une surface imperméable. Dans le cadre de ses travaux de maîtrise, Mme Styler a sondé la saleté urbaine composée de pyrène, qui fait partie du groupe de composés chimiques contenus dans les émissions des véhicules appelé hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).
À l'aide d'une technique de fluorescence induite par laser, Mme Styler a tenté de déterminer si la lumière solaire accroît la réaction d'oxydation entre le pyrène et l'ozone. Elle a découvert que la lumière solaire n'a pas d'effet sur la réactivité du pyrène incorporé dans un film urbain expérimental. Cependant, lorsque la même expérience a été réalisée avec un film de pyrène solide, elle a trouvé que la lumière peut doubler le taux de réaction du composé avec l'ozone.
Selon Mme Styler, ses recherches ont été motivées par des expériences antérieures qui montraient que lorsque les HAP réagissent avec des oxydants, les sous-produits qui en résultent sont souvent plus toxiques que les produits chimiques de départ.
Ayant terminé sa maîtrise avec succès, cette scientifique a maintenant hâte à sa prochaine affectation. Elle se rendra bientôt à la prestigieuse Tate Gallery de Londres, où elle suivra un stage convoité en tant que scientifique en conservation. Elle travaillera à la Tate Britain, l'une des quatre galeries d'art renommées dans le monde entier qui abritent des collections allant du 16e siècle jusqu'à aujourd'hui.
« En tant que chimiste ayant récemment acquis un intérêt pour l'art, je suis vraiment enthousiasmée par la chance que m'offre la Tate Gallery. Il s'agit en fait d'un prolongement logique à mes travaux de maîtrise, parce que la lumière et les oxydants sont tout aussi importants dans la conservation des œuvres d'art qu'ils le sont en chimie de l'atmosphère. »