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Ancien lauréat
Médaille d'or Gerhard-Herzberg en sciences et en génie du Canada de 2008

Paul Corkum

Physique

Université d'Ottawa et Conseil national de recherches


Paul Corkum
Paul Corkum

Dans le domaine du gel d'image, Paul Corkum a laissé une marque indélébile dans le monde. On lui attribue la mise au point d'une technologie permettant de générer des impulsions laser attosecondes – des impulsions lumineuses si brèves qu'elles permettent de capter l'image d'un électron gravitant autour de son atome.

Cette technologie qui ouvre un accès sans précédent au monde subatomique n'est que la dernière de la longue série de réalisations qui ont valu à M. Corkum la Médaille d'or Gerhard-Herzberg en sciences et en génie du Canada.

Pendant plus de 30 ans, il a repoussé les frontières de la connaissance humaine des interactions entre la lumière et la matière. Ses réalisations lui ont valu les éloges appuyés de ses pairs dans le monde entier.  

Ses travaux de recherche ont principalement porté sur les lasers qui ont constitué de précieux outils pour une foule d'applications scientifiques pendant de nombreuses années. Des percées technologiques, du milieu des années 1960 jusqu'au milieu des années 1980, ont permis de réduire de façon constante la durée des impulsions de lumière produites par les lasers. Mais cette période féconde a été subitement interrompue en 1986 où on s'est heurté à un mur pendant près d'une décennie, jusqu'à ce que M. Corkum élabore une nouvelle approche théorique qui a été acclamée par l'Optical Society of America comme l'une des plus grandes découvertes de 1994 en science optique.

Il a fallu sept autres années avant que la théorie devienne réalité : M. Corkum et ses collègues ont réussi à produire une impulsion de 650 attosecondes (une attoseconde correspond à 10-18 seconde, soit un milliardième de un milliardième de seconde). Encore une fois, cette réalisation a été saluée comme l'une des principales percées scientifiques de l'année. Aujourd'hui, la norme s'établit à 80 attosecondes et ne cesse de diminuer.

Le défi lié à la génération d'une impulsion attoseconde ne réside pas uniquement dans la production de l'impulsion, mais également dans la vérification de sa longueur. Fait ironique, la seule chose suffisamment rapide pour mesurer une impulsion de lumière extrêmement courte est… une impulsion de lumière extrêmement courte. Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont fait preuve d'ingéniosité, entre autres en séparant l'impulsion en deux parties et en faisant parcourir à l'une des deux parties une distance légèrement supérieure pour en déterminer la longueur – soit en utilisant le rayon lumineux pour le mesurer. Les mêmes principes qui rendent possible la production d'impulsions lumineuses de l'ordre de l'attoseconde peuvent être utilisés pour produire des impulsions électroniques du même ordre.

Les impulsions attosecondes permettent aux chercheurs de connaître les échelles temporelle et spatiale des électrons qui déterminent les propriétés de la matière – des notions comme la réactivité d'une substance, sa capacité de former des liaisons ou son existence sous forme solide, liquide ou gazeuse. L'étude de la matière à ce niveau ouvre une foule d'applications possibles entre autres en chimie, en informatique quantique, en médecine, en physique des semiconducteurs.

M. Corkum a été en mesure de capter l'image d'un électron – en quelque sorte. « On ne peut pas vraiment photographier un électron, explique-t-il. Tout ce qu'on obtient, c'est une image floue. La limite, c'est ce que l'on peut voir selon la mécanique quantique. »

De plus, selon les principes de mécanique quantique, le seul fait d'utiliser une impulsion lumineuse pour obtenir une image d'atomes et de molécules modifie l'objet même que l'on photographie. À cette échelle, les photons de lumière entrent en collision avec les électrons et détruisent les liens qui tiennent les molécules ensemble. Alors, pour réaliser un de ses buts – filmer une réaction chimique – M. Corkum devra littéralement procéder image par image, en utilisant chaque fois une nouvelle molécule.

Les impulsions attosecondes nous offrent non seulement de nouvelles possibilités pour l'étude de la matière mais également une nouvelle façon de contrôler la matière à l'échelle moléculaire. Dans le monde en plein essor de la nanotechnologie, les possibilités sont pratiquement illimitées. 

Quant à la direction que prendra ce nouveau domaine passionnant dans l'avenir, M. Corkum affirme que cela dépendra de l'esprit d'innovation de ceux qui œuvreront dans ce domaine. « C'est comme pour la mise au point de la première caméra, note-t-il. La première étape consiste à montrer qu'on peut le faire. Ce n'est pas la caméra elle-même qui a eu tant d'impact – c'est l'idée de la caméra que d'autres ont reprise et ont développée. Nous ne savons pas où cela mènera. C'est un nouvel outil qui vient tout juste de s'offrir à nous. »

Il s'attend à ce que la théorie et la technologie actuelles permettent d'obtenir des impulsions laser entre 100 et 1 000 fois plus courtes que celles que nous obtenons aujourd'hui. « Alors nous nous heurterons de nouveau à un mur, comme c'est toujours le cas en sciences, prédit-il. Quelqu'un devra avoir une nouvelle idée. »