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Ancien lauréat
Prix de doctorat du CRSNG de 2005

Bradley John Siwick

Physique

University of Toronto


S'il y avait des Oscars pour la recherche en physique, Bradley Siwick serait probablement le choix unanime de « l'Académie de la physique » pour le titre de meilleur réalisateur. Il décrocherait également les Oscars du meilleur film et des meilleurs effets spéciaux, et il serait acclamé comme le prochain Scorcese ou Coppola. Mais le film réalisé par M. Siwick ne dure que 3,5 billionième de seconde (ou en jargon scientifique, 3,5 picosecondes). Les vedettes de ce film sont certes microscopiques, mais il a passionné la communauté scientifique, grâce à ses images en temps réel montrant la fusion d'un solide, atome par atome, les premières images du genre obtenues au niveau atomique.

« La production d’un film moléculaire constitue en quelque sorte le Saint-Graal de la chimie », souligne Bradley Siwick, titulaire depuis peu d’un doctorat de l'University of Toronto et lauréat d'un Prix de doctorat du CRSNG de 2005  – l’une des distinctions les plus prestigieuses accordées au Canada aux étudiants diplômés.

Ses débuts marquants en « cinématographie physique » sont d'autant plus remarquables que la concurrence internationale était intense pour capter sur le vif ces interactions évanescentes d'atomes en mouvement. Ces travaux s’inscrivent dans la « science de l'ultrarapide ». Ils s'appuient sur les progrès récents en technologie du laser et emploient des impulsions de rayons X ou d'électrons pour saisir des mouvements moléculaires fugitifs de l'ordre de la femtoseconde (10-15 seconde), y compris la rupture et la formation des liaisons chimiques. Les scientifiques estiment que ces observations directes les aideront à mieux comprendre les forces primaires qui régissent le comportement des atomes.

Cet objectif est à l'origine de projets de mégascience aux États-Unis, en Allemagne et au Japon, visant à construire des sources de rayons X femtosecondes, au coût de plusieurs milliards de dollars.

Bradley Siwick a réalisé ses expériences à l’aide d’un simple système laser de bureau qu'il a construit dans son laboratoire de l'University of Toronto. C’est comme produire une superproduction cinématographique à l'aide d'un caméscope d’amateur! Sa découverte a été accueillie dans le monde scientifique comme une percée majeure et a fait la page couverture de la revue Science en novembre 2003.

Pour obtenir ce résultat remarquable, M. Siwick, en collaboration avec une équipe dont faisait partie le physicien Dwayne Miller, son directeur de thèse à l'University of Toronto, s’est appuyé à la fois sur une bonne compréhension théorique et une bonne dose d'intuition technique, afin de créer une « caméra » qui utilise les électrons et leur mécanisme de diffraction ou de diffusion pour réaliser des films au niveau atomique.

Afin de surmonter les obstacles techniques associés aux impulsions d'électrons ultrarapides, il a d’abord fallu faire de la modélisation computationnelle. En effet, les électrons chargés négativement sont soumis à des forces répulsives, ce qui, à moins de contrer ces forces, brouillerait les détails des mouvements des atomes et donnerait un film « flou ».

Pour relever ce défi, Bradley Siwick a construit un instrument unique en son genre, la première « caméra » moléculaire, qui lui permet de produire constamment des impulsions d'électrons et donc des « courts-métrages » d'une durée inférieure à 500 femtosecondes.

Au XIXe siècle, Eadweard Muybridge, pionnier de la photographie, avait fait d’un cheval au galop la vedette de l'un des premiers films au monde. De nos jours, M. Siwick a choisi de filmer la fusion de l'aluminium polycrystallin, passant de la phase solide à la phase liquide, pour produire le premier vidéoclip femtoseconde au monde.

« Nous avons capté sur le vif la configuration atomique détaillée du matériau, à mesure qu'il passe de la phase solide à la phase liquide, et ce, en seulement 3,5 picosecondes », explique Bradley Siwick, titulaire d’une bourse postdoctorale du CRSNG à l'Institute for Atomic and Molecular Physics, à Amsterdam.

À Amsterdam, il continue d'étudier le réarrangement rapide des atomes, mais cette fois-ci dans une substance beaucoup plus commune, l'eau. Il espère déterminer comment les protons en liberté, toujours présents dans l'eau, sont transférés entre les molécules d'eau individuelles.