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Ancien lauréat
Prix de doctorat du CRSNG de 2004

Alexandre Blais

Physique

Université de Sherbrooke


Alexandre Blais
Alexandre Blais

Un physicien canadien a retenu l’attention sur la scène nationale et internationale en contribuant à la création du premier ordinateur quantique du monde, et ce, alors qu’il était étudiant de 3e cycle.

Bien qu’Alexandre Blais parle d’un « petit pas » s’inscrivant dans une démarche de longue haleine, ses travaux améliorent les aspects pratiques de la construction de bits quantiques, ou qubits, et proposent une nouvelle façon de maintenir la cohérence quantique, essentielle à tout processeur quantique efficace.

« Pour que les qubits aient une utilité quelconque, nous devrions pouvoir les contrôler et mesurer leur valeur, affirme M. Blais, titulaire depuis peu d’un doctorat de l’Université de Sherbrooke et lauréat d’un Prix de doctorat du CRSNG de 2004 – l’un des prix les plus importants décernés au Canada aux nouveaux titulaires d’un doctorat. »

« Cela signifie que les qubits ne peuvent être ni trop petits ni isolés de tout autre corps. Il s’agit d’une énorme contradiction, car le comportement des corps qui ne sont ni très petits ni très isolés des corps les entourant n’obéit généralement pas aux lois de la mécanique quantique. Ces corps obéissent plutôt aux lois de la physique newtonienne classique. »

Pour compenser la perte des propriétés mécaniques quantiques (appelée décohérence), Alexandre Blais a orienté ses recherches vers un autre domaine de la physique qui présente un grand intérêt: les supraconducteurs. Ces matériaux présentent des caractéristiques spéciales, car dans certaines conditions, d’ordinaire à de très basses températures, juste au-dessus du zéro absolu (0º K ou -273 ºC), tous leurs électrons se comportent comme s’il n’y en avait qu’un seul. On parle alors de condensat de Bose-Einstein.

En collaboration avec Alexandre Zagofkin de D-Wave Systems, de Vancouver, M. Blais a proposé de créer l’un des premiers types de qubits supraconducteurs, dont la conception repose sur une jonction d’un millionième de mètre (une très grande jonction, selon les normes de la mécanique quantique) entre deux supraconducteurs d’aluminium à haute température. Au moins trois équipes de chercheurs dans le monde expérimentent maintenant cette approche.

« Un avantage pratique tient au fait qu’il existe déjà une expertise considérable dans le domaine de la fabrication de circuits électriques supraconducteurs, affirme Alexandre Blais, maintenant stagiaire postdoctoral à la Yale University, au laboratoire de Steve Girvin, physicien spécialiste de la matière condensée. »

En s’appuyant sur le problème de la construction de qubits qu’il avait étudié au début de ses travaux de doctorat, M. Blais s’est penché sur le problème plus frustrant de l’enchevêtrement quantique ou de la préservation de la cohérence dans un groupe de qubits. Outre Alexandre Zagofkin, MM. André-Marie Tremblay et Serge Lacelle, ses directeurs de thèse à l’Université de Sherbrooke, ont participé à la recherche.

Pour exécuter une opération logique, deux bits, ou qubits, doivent communiquer. Par exemple, dans un ordinateur traditionnel à semi-conducteurs, un bit pourrait être « 0 » et l’autre « 1 », et leur combinaison correspondrait à une opération donnée. Toutefois, dans le cas d’un ordinateur quantique, s’il y a une interaction directe entre les qubits, ceux-ci s’enchevêtrent et perdent leurs caractéristiques particulières.

« L’enchevêtrement est l’une des prédictions les plus étranges de la mécanique quantique, mais c’est cette propriété qui donne une grande puissance à l’ordinateur quantique. Ce que j’ai proposé, c’est un moyen de produire un enchevêtrement d’une façon contrôlée », explique M. Blais.

Il a proposé un système unique en son genre, dans lequel un troisième qubit facile à construire sert d’intermédiaire.

« Il n’y a aucune interaction directe entre les deux qubits, précise M. Blais. Ils "parlent" uniquement à un troisième système, qui est le médiateur de l’enchevêtrement. »

M. Blais a présenté une demande de brevet visant le procédé. Et, en 2003, un groupe de l’University of Maryland sous la direction de Chris Lobb affirmait dans la revue Science avoir réussi à construire une version simplifiée de ce système de qubits.

À la Yale University, Alexandre Blais continue d’explorer les bizarreries quantiques en faisant appel à son expertise dans le domaine des matériaux supraconducteurs pour étudier l’électrodynamique quantique en cavité. Il fait partie d’une équipe de chercheurs qui utilise des fragments d’aluminium supraconducteur de l’ordre du micromètre, placés dans une cavité minuscule, pour étudier l’interaction entre un seul photon et l’équivalent d’un seul atome (d’aluminium).

« Dans ces conditions, le circuit d’aluminium entre même en interaction avec aucun photon, ajoute M. Blais, avec un petit rire quantique. C’est de la physique très intéressante. »