
Arborescence glacée
En raison des changements climatiques, les épisodes de pluie verglaçante seront probablement plus fréquents et plus violents sur notre territoire. Il importe donc de prédire quels arbres, en milieu urbain, sont susceptibles de casser sous le poids du verglas. Pour ce faire, on peut utiliser un scanner laser qui génère des images 3-D des arbres, révélant les détails de leur structure. Sur cet érable argenté montréalais, vu de face et du dessus, le potentiel d’accumulation de verglas est représenté par un gradient de couleur variant du blanc (faible) au bleu (élevé).
Attention, plancton mortel!
Parmi le plancton qui dérive dans nos eaux, on trouve des espèces toxiques appartenant au genre Alexandrium. Le spécimen montré ici est « colorisé » d’une teinte écarlate rappelant les dangereuses marées rouges dont il peut être la cause (en vert, une bactérie). En 2008, ces tueuses microscopiques ont envahi l’estuaire du Saint-Laurent sur une superficie de 600 kilomètres carrés. Leur toxine paralysante a provoqué une hécatombe chez les poissons, les oiseaux marins, les phoques et les bélugas, et forcé la fermeture des bancs coquilliers. Pour éviter qu’une floraison toxique frappe l’Arctique canadien, où la pêche est vitale pour les populations, on effectue un suivi du plancton nuisible.
Lumière sur le relief terrestre
La technologie LiDAR est une méthode de télédétection consistant à mesurer des distances de manière ultraprécise en illuminant une cible à l’aide d’un faisceau laser et en captant sa réflexion. Montée à bord d’un aéronef, cette technologie permet de reconstruire numériquement le relief terrestre et de découvrir ainsi les éléments dissimulés sous la canopée. Les applications vont de la cartographie des zones inondables à la détection de vestiges archéologiques. L’image présentée ici dévoile les méandres de la rivière Ouelle, près de Saint-Pacôme, ainsi que divers éléments géomorphologiques tels des affleurements rocheux (masses foncées) et des plages sableuses formées par d’anciennes mers.
Soleil microbien
Ce faux soleil est un biofilm, une communauté bactérienne « soudée » par une matrice de sucres et de protéines. La rencontre de deux espèces – Bacillus subtilis et Staphylococcus aureus – produit cette structure très résistante à l’eau. Le staphylocoque doré est responsable de la couleur jaune… et de diverses infections chroniques chez l’humain. Ces dernières sont parfois difficiles à traiter, car S. aureus résiste à plusieurs antibiotiques. Comment contrer cette résistance? Des chercheurs et chercheuses font le pari suivant : modifier génétiquement B. subtilis pour la rendre capable de neutraliser sa comparse.
La vie en rose
Rares sont les personnes qui ont déjà vu une sauterelle de cette couleur! En fait, rares aussi sont celles qui savent reconnaître une sauterelle, même verte. Les sauterelles, comme Amblycorypha oblongifolia, qui est bel et bien présente au Québec, sont de mœurs nocturnes, contrairement aux criquets. Ce spécimen-ci doit sa coloration aberrante à une rare mutation génétique appelée érythrisme. Puisque ce gène mutant serait dominant, les individus roses devraient être plus nombreux dans la nature. Pour comprendre pourquoi la majorité demeure verte, l’Insectarium tente de démarrer le premier élevage de sauterelles roses au monde!
Une baleine qui a du panache
Dans le cadre de mes travaux de doctorat à l’Université du Nouveau-Brunswick, à Saint John, j’utilise un drone quadricoptère pour étudier la santé des grandes baleines dans le Canada atlantique. Le drone est muni d’une caméra à spectre visible, ce qui nous donne une occasion unique d’observer de près ces baleines, sans les gêner, pour évaluer l’état de leur corps et repérer de possibles blessures ou encore des cas d’empêtrement. Le drone dispose aussi d’une caméra thermique, qui nous permet d’estimer la température corporelle des baleines (un peu comme au moyen d’un thermomètre sans contact!). J’ai photographié ce rorqual à bosse mâle d’âge adulte dans la baie de Fundy en septembre 2020. Le drone était à environ 12 m d’altitude, ce qui nous a permis d’obtenir des images rapprochées des évents du rorqual tandis qu’il remontait à la surface pour respirer. Les baleines expulsent souvent un jet de vapeur et de mucus, une sorte de panache facile à repérer de la terre ferme ou d’un bateau. Sur la photo, le jet reflète la lumière du soleil de sorte que l’on peut apercevoir un arc-en-ciel!
Penser sans cerveau
La forme jaune que l’on voit dans cette image est une cellule de Physarum polycephalum, un organisme unicellulaire de la catégorie des myxomycètes également appelé « moisissure visqueuse ». Cette cellule n’a pas de cerveau ni d’architecture neuronale, mais elle est incroyablement intelligente. Elle est capable de trouver le chemin le plus court dans des labyrinthes, de créer des réseaux qui reproduisent ceux conçus par l’humain pour le transport ferroviaire, d’apprendre et même de stocker des souvenirs. Nous cherchons à comprendre comment cet organisme simple utilise son corps à la fois comme un réseau de capteurs et comme un ordinateur biologique pour prendre des décisions à long terme. La découverte du fait que même les êtres vivants les plus simples peuvent effectuer des calculs biologiques qui sont délibérés ou qui visent l’atteinte d’un objectif, et que ces êtres présentent une forme de cognition — si primitive soit-elle — qui est analogue à la nôtre, nous amène à remettre en question l’idée reçue voulant qu’il faille avoir un cerveau pour penser et ressentir. La compréhension du langage computationnel de Physarum et d’autres organismes simples pourra guider la conception d’intelligences artificielles d’inspiration biologique et nous permettra peut-être même de découvrir les origines de la pensée.
Les zéines, superhéroïnes de la galaxie sans gluten
La maladie céliaque et la sensibilité au gluten non céliaque toucheraient environ 6 % de la population canadienne. Les aliments sans gluten étant de plus en plus demandés, il devient pressant de trouver une substance qui pourrait remplacer le gluten dans les produits de boulangerie. Prise au microscope, l’image montre les fibrilles (en rouge) d’une protéine de zéine recouvrant des granules d’amidon (en bleu) et formant une substance semblable à de la pâte. La formation d’un réseau de fibrilles est essentielle à l’éventuelle utilisation de la zéine comme substance de qualité pour remplacer le gluten dans les produits de boulangerie. Sur l’image, on peut voir clairement les fibrilles de zéine qui entourent les granules d’amidon et donnent ainsi à la pâte la consistance et l’élasticité nécessaires à son utilisation en boulangerie. Ces protéines uniques sont-elles la solution tant attendue à la préparation de produits de boulangerie de haute qualité sans gluten?
Illumination métallo-organique
Les bâtonnets hexagonaux lisses que l’on voit dans l’image sont des matrices métallo-organiques, une classe fascinante de matériaux poreux hautement structurés, formés de constituants inorganiques et organiques. L’image montre une représentation tridimensionnelle de NU 1000, un type de matrice métallo-organique composée de zirconium, de carbone et d’oxygène. Le matériau a été synthétisé par des procédés de « chimie verte », au moyen d’un solvant écologique produit à partir de sources biorenouvelables. Cette technique de production ouvre la voie à la synthèse durable de matrices métallo-organiques et à leur utilisation à diverses fins, notamment pour l’assainissement des eaux usées, la réalisation de séparations chimiques ainsi que le captage et le stockage de gaz. Une fois synthétisé, NU-1000 a l’aspect d’une poudre microcristalline de couleur jaune vif, ce qui explique les halos jaunes que l’on peut voir sur l’image.
Portrait haut en couleur
Requins, raies et chimères sont des poissons dont les squelettes se composent non pas d’os, mais de cartilages. Il est désormais possible de réaliser par tomodensitométrie des images 3-D de ces structures cartilagineuses, malgré leur faible contraste avec les tissus mous. C’est le cas ici pour ce chien de mer à taches noires (Aulohalaelurus labiosus), un petit requin qui rôde au large de la côte ouest de l’Australie. On distingue le crâne, les nageoires pectorales et le début de la colonne vertébrale. L’attribution de couleurs sert à dévoiler les différentes structures du squelette de ce requin... littéralement dénudé.
Agglomération cellulaire
Isabelle Gendron-Lemieux
Lisandre Gilmore-Solomon
Nous voyons ici le détail de la grande feuille, appelée fronde, d’une algue rouge appartenant au genre Porphyra. L’examen au microscope de cette algue comestible révèle l’existence de cellules reproductrices (vertes et brunes). Certaines fermes d’aquaculture québécoises explorent l’idée de cultiver les espèces locales de Porphyra afin d’en faire la « nori » de l’Atlantique des sushis. Des tests réalisés aux îles de la Madeleine ont aussi démontré sa capacité à purifier l’eau des viviers à homards. Pour doper sa croissance, cette algue utilise l’azote excrété par les animaux marins!
Rarissime scarabée rhinocéros
René Limoges
L’ordre des coléoptères regroupe quelque 500 000 espèces à l’intérieur de 500 familles. Les scarabées forment l’une d’elles (25 000 espèces), qui se divise en 20 sous-familles, dont celle des scarabées rhinocéros (1 600 espèces). Il existe un seul genre dont les deux espèces connues, originaires du Queensland en Australie, possèdent d’intrigantes épines sur leurs élytres. La première, Nephrodopus enigma, sur la photo, fut décrite en 1873, et l’autre, Nephrodopus goldingi, en 2019. On ne connaît encore rien sur l’œuf, la larve ou la vie du « photographié ». L’un des rares spécialistes des scarabées rhinocéros travaille à l’Insectarium de Montréal. D’où ce précieux spécimen!
Fleur de givre
Julie Genoyer
Cette mosaïque de pétales cristallins n’a pas à craindre le retour du printemps : elle pourrait demeurer intacte dans les plus chauds déserts. Sertie entre deux lamelles de microscope, elle a été obtenue en chauffant d’abord de la poudre de polypropylène à une température d’environ 170 ºC. Le polymère, une fois liquéfié, a ensuite été refroidi. C’est durant cette phase de solidification qu’il s’est organisé en sphérolites : des structures en forme d’éventail quasi circulaire. Sachant que les propriétés mécaniques du polypropylène dépendent de ses caractéristiques microscopiques, leur observation détaillée permet d’en caractériser le comportement.
Courants fluorescents
11 septembre 2020, au large de Rimouski. Des centaines de litres de rhodamine s’échappent du navire Coriolis II. Une catastrophe écologique? Pas du tout! Il s’agit d’une expérience qui vise à améliorer les modèles de dérive océanique. Pour suivre la dispersion de ce colorant inoffensif, on a utilisé un drone et des embarcations munies de capteurs de fluorescence. De plus, des dizaines de bouées dérivantes ont été mises à l’eau pour vérifier si leur trajectoire correspond à la dérive du colorant. Cette recherche pourrait faciliter les sauvetages en mer et la récupération des nappes de contaminants, dont le pétrole.
Berceau de métastases
Cette cellule cancéreuse détachée de sa tumeur vient de s’établir dans un nouvel endroit. Elle est maintenant prête à former une métastase. Le cancer va progresser. Pour que cela se produise, la cellule doit développer des protrusions, sortes de tentacules disposés sur la surface extérieure, nécessaires à son déplacement. Mais gardons notre calme, on est au laboratoire et ce type d’expériences visent à mieux comprendre le rôle des mitochondries (en vert) dans cette histoire! Ces petites usines énergétiques au sein de chaque cellule se restructurent au moment où les cellules cancéreuses migrent et forment des métastases.
Sauver sa peau
Après quelques contorsions et cabrioles, ce triton alpestre (Ichthyosaura alpestris) s’est extirpé de sa mue. Sa nouvelle peau lui permettra de s’hydrater et de respirer... à moins d’être contaminée par un champignon pathogène! En effet, une mycose décime actuellement les populations d’amphibiens d’Europe. Le responsable est un champignon du groupe des chytrides, Batrachochytrium salamandrivorans. On prédit son arrivée imminente en Amérique. Heureusement, on a découvert sur la peau de certains individus des bactéries protectrices qui combattent le champignon. La survie des amphibiens du Canada pourrait résider dans l’étude de leur microbiome cutané.
Les routes migratoires
Pendant le développement embryonnaire, les cellules issues de la crête neurale (en vert) migreront le long des nerfs (en rouge) qui partent du tube neural (future moelle épinière). Autant de routes qui permettront à ces cellules souches transitoires de se déployer dans les diverses régions de l’embryon et de se différencier en des types très variés. Certaines participeront à l’élaboration du système nerveux périphérique qui assure la circulation de l’information entre les organes et le cerveau. D’autres contribueront à la formation soit du cœur, soit des reins, ou encore, des intestins... Autant de destins que de destinations nécessaires au prodige de la gestation.
Désert de sel nanométrique
Bien que cette image ressemble à un désert de sel vu du ciel, ce faux paysage est apparu sur une lame de microscope! Pour créer les petits îlots, on « cristallise » une solution de sels de nitrate. On obtient alors de la ferrite de bismuth (BiFeO3). Ce composé pourrait servir dans la fabrication de transistors qu’on placerait au sein des ordinateurs, afin d’augmenter leur puissance de calcul et de réduire leur consommation d’électricité. C’est là un matériau révolutionnaire, l’un des rares à présenter à la fois une polarisation et des propriétés magnétiques à température ambiante. Reste la difficile tâche d’en dompter la chimie...
Fenêtres sur mer
Un vitrier négligent aurait-il abandonné son chargement de verre dans la baie des Chaleurs? En réalité, ces structures transparentes, qui mesurent plusieurs dizaines, voire des centaines de mètres, sont des plaques de glace de mer. Appelées « nilas », d’une épaisseur de quelques centimètres, elles se forment par mer calme et demeurent étonnamment flexibles. Les nilas de cette sorte résultent de l’agglomération continue de frasil : ce sont de fines aiguilles ou plaquettes de glace en suspension dans l’eau. Observer le développement de la banquise permet, entre autres, de mieux prévoir les conditions de glace à court terme ou d’estimer le devenir de l’océan Arctique.
L’effet boule de neige
Dans les eaux usées, les contaminants (en brun) forment de tout petits agrégats (à gauche), que les usines d’épuration peinent à intercepter. Afin de les capturer et de faciliter leur décantation, on ajoute dans les bassins de traitement des fibres de cellulose (au centre) provenant de papier recyclé. Or, des chercheurs et chercheuses viennent de mettre au point un nouveau procédé qui conduit ces fibres de cellulose à former des microsphères ultraporeuses et superadsorbantes (à droite). Grâce à l’efficacité de ces éponges à contaminants, réutilisables une dizaine de fois, on réduira l’empreinte environnementale et les coûts de fonctionnement des usines d’épuration.