La science du visionnage en rafale

Imaginez‑vous en 1998. Regarder en continu vos émissions favorites dans Internet est une utopie, et des problèmes techniques vous empêchent de rester à l’affut des dernières nouvelles. Des millions de personnes partout dans le monde essaient d’accéder en même temps à des sites de nouvelles crédibles, ce qui provoque des pannes de serveurs.

Faites une avance rapide de 20 ans. Vous et des millions de personnes partout dans le monde pouvez maintenant accéder simultanément à des sites Web ou regarder vos séries télévisées et vos films préférés dans Internet sans temps mort ni interruption. Tout cela est possible grâce, en partie, à Tim Brecht, un informaticien de la University of Waterloo qui est financé par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG).

M. Brecht, qui a réalisé des travaux de recherche sur les serveurs Web et transformé le visionnage dans Netflix en une expérience qui se déroule parfaitement et sans interruption, a non seulement créé la technologie, mais en a aussi récolté les fruits dans sa vie personnelle : « J’ai regardé la série Friends with my family dans Netflix. C’est merveilleux de pouvoir regarder en continu trois ou quatre épisodes ».

Le service offert par Netflix repose sur des serveurs équilibrés. Auparavant, l’entreprise devait acheter de plus en plus de serveurs pour répondre à la demande grandissante. Les techniques élaborées par M. Brecht ont considérablement accru l’efficacité des serveurs, qui peuvent désormais gérer simultanément un plus grand nombre d’utilisateurs et de demandes. Aujourd’hui, la grande quantité de vidéos visionnées partout dans le monde témoigne de l’importance cruciale de ces travaux pour l’expérience des utilisateurs qui ont recours à des services tels que Netflix.

Examinons plus en détail les réalisations de M. Brecht et de son équipe. Deux tâches essentielles permettent maintenant aux utilisateurs de regarder sans problème des vidéos dans Netflix : l’extraction des données à l’avance et la sérialisation des demandes.

La première consiste à prévoir que le téléspectateur continuera probablement de regarder la même vidéo. Le serveur peut prédire les demandes que fera chaque utilisateur, puis extraire les données et les stocker en mémoire jusqu’à ce que l’appareil du téléspectateur les demande.

« C’est comme aller à l’épicerie et acheter des provisions pour une journée ou plusieurs journées. C’est bien d’aller à l’épicerie chaque jour; cela vous permet de manger et de survivre. Mais c’est plutôt inefficace, parce que vous passez une bonne partie de votre temps à vous déplacer. Si vous prévoyez ce que vous mangerez au cours des jours suivants, vous pouvez aller chercher à l’avance vos aliments et les entreposer dans votre réfrigérateur », explique M. Brecht. Ce modèle est beaucoup plus efficace, puisque les données vidéos n’ont pas de date d’expiration.

Dans la même veine, la sérialisation consiste à faire en sorte qu’une seule demande de données soit traitée à la fois. Elle consiste aussi à ne pas diviser les données volumineuses en petites parties―ce qui ralentit leur transmission.

M. Brecht poursuit son explication en gardant l’analogie de l’épicerie : « Imaginez que plutôt que de laisser entrer tout le monde en même temps dans l’épicerie, vous classez les clients et ne permettez qu’à une seule personne à la fois d’entrer; elle achète ses aliments, les paie et s’en va. Cette façon de magasiner est beaucoup plus efficace ».

Le projet qui a mené à ces découvertes novatrices a été réalisé en collaboration par un groupe d’employés de Netflix, plusieurs professeurs d’université et des étudiants diplômés qui ne comptent plus le nombre d’heures qu’ils ont passées en laboratoire. Chaque projet de recherche qui mène à une percée commence par une idée et par quelqu’un qui en voit le potentiel et qui peut trouver les ressources pour le financer. Les travaux sur l’amélioration de l’efficacité des serveurs Web n’auraient pas été possibles sans le financement du CRSNG qui a donné l’appui requis pour que le projet prenne l’essor qu’il méritait.

M. Brecht bénéficie de l’appui du CRSNG depuis 1994. « La subvention à la découverte me donne une base pour commencer de nouveaux travaux et les faire progresser suffisamment pour qu’une entreprise s’y intéresse. Quand c’est le cas, celle‑ci me fournit souvent des fonds et si elle est canadienne, je peux avoir recours à un programme tel que le Programme de subventions de recherche et développement coopérative pour obtenir des fonds de contrepartie qui feront véritablement décoller le projet », précise le chercheur au sujet du financement qu’il a reçu au fil des ans.

Pour M. Brecht, l’occasion qu’il a eue de mettre à l’essai la technologie pendant qu’il était en congé sabbatique a été le moment fort du projet. « Au bout du compte, la chose la plus agréable est de savoir que certaines de vos idées ont été mises en pratique dans des systèmes utilisés par plus de 125 millions d’abonnés partout dans le monde », conclut M. Brecht.

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