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Ancienne lauréate
Prix de doctorat du CRSNG de 2004

Marie Evangelista

Biologie cellulaire

Queen's University


C'est en observant l'impuissance sexuelle dans la levure que Marie Evangelista a eu l'idée qu'un gène appelé Bni1 méritait que l'on s'y intéresse.

Cette très bonne intuition a amené la scientifique, titulaire depuis peu d'un doctorat de la Queen's University, à découvrir une protéine au cœur du processus qui détermine la forme des cellules et leur mode de division. C'est grâce à cette découverte que Mme Evangelista a remporté un Prix de doctorat de 2004 du CRSNG – l'un des prix les plus importants au Canada décernés aux nouveaux titulaires d'un doctorat.

La découverte de la chercheuse a des retombées dans différents domaines. Par exemple, elle permet de comprendre comment les bactéries détournent et dirigent les cellules humaines ou encore comment les cellules cancéreuses se propagent.

Les cellules eucaryotes (celles qui ont un noyau), qu'il s'agisse de levures ou de cellules humaines, possèdent un squelette interne formé de molécules d'actine reliées en longues chaînes, ou filaments. Les biologistes cellulaires savent depuis des dizaines d'années que les filaments d'actine sont configurés de deux façons selon leur fonction : en chaînes ramifiées, similaires à un arbre, ou regroupées comme un faisceau de fils d'acier.

À la fin des années 1990, des chercheurs ont découvert le complexe protéique Arp2/3, qui régule l'assemblage des structures d'actine ramifiées.

« Mais nous ne comprenons toujours pas comment les faisceaux d'actine sont générés dans les cellules vivantes », affirme Mme Evangelista.

Nombre de biologistes moléculaires, dont Mme Evangelista et son directeur de travaux et proche collaborateur Charlie Boone, sont partis de l'hypothèse que la formation des faisceaux d'actine est également régulée par Arp2/3. La question était de savoir comment. La chercheuse a émis l'hypothèse que l'activité d'Arp2/3 était assujettie à un autre gène, Bni1. En employant de la levure, l'eucaryote le plus simple, elle a éliminé ce gène pour voir ce qui se passerait.

« Si l'on élimine Bni1 de la levure, cette dernière ne forme plus de projections d'accouplement, si bien que les cellules ne peuvent plus changer de forme pour s'accoupler, explique Mme Evangelista depuis San Francisco, où elle mène des travaux de recherche postdoctoraux chez Genentech Inc. Mais il y a beaucoup de molécules qui déterminent la configuration des filaments d'actine. Nous ne savions pas à quel niveau de l'organisation intervenait Bni1. »

Il s'avère que Bni1 joue le rôle principal.

Après avoir consacré quatre années de dur labeur, dans le cadre de ses travaux de doctorat, à rechercher le lien moléculaire reliant Arp2/3, Bni1 et l'actine, Mme Evangelista a décidé de réaliser des essais sur la protéine Bni1 dérivée de levures directement avec les molécules d'actine. Enfin, elle a été en mesure de combiner la protéine Bnil purifiée et les protéines d'actine.

« Je croyais qu'il ne se passerait rien », relate Mme Evangelista. Mais, en testant le mélange, elle a constaté que les filaments d'actine pouvaient se former beaucoup plus rapidement en présence de la protéine Bni1.

La chercheuse a alors fait venir Charlie Boone. Elle explique : « Nous étions fascinés. Nous restions là sans rien faire. Nous savions immédiatement qu'il s'agissait d'une grande découverte. Je l'ai regardé et j'ai dit : “Je pense bien que cette découverte me permettra d'obtenir mon diplôme très bientôt!” ».

Les résultats publiés en 2002 dans la revue Science par Marie Evangelista, en collaboration avec David Pruyne et Anthony Bretscher, de la Cornell University, et Sally Zigmond, de l'University of Pennsylvania, ont suscité beaucoup d'éloges.

Depuis, d'autres chercheurs ont démontré que Bni1 joue le même rôle dans les cellules de mammifères. Cette année seulement, des chercheurs ont défini la structure cristalline de la protéine, ouvrant ainsi la voie au décodage de sa séquence détaillée d'acides aminés.

Selon Mme Evangelista, étant donné le rôle de premier plan que joue Bni1 dans la régulation de la formation des faisceaux d'actine, il est important pour comprendre tout processus qui fait intervenir la polarité et le mouvement cellulaires.

« D'ordinaire, la régulation du cytosquelette de l'actine maintient les cellules immobiles, précise-t-elle. En cas de dérèglement, les cellules peuvent par exemple métastaser, provoquant un cancer, ou encore devenir motiles. »

À Genentech, Mme Evangelista s'efforce de décoder une autre voie moléculaire, liée cette fois à une anomalie génétique qui confère aux embryons une tête dont la forme ressemble à celle du hérisson. Quand on lui demande ce qu'elle découvrira, la chercheuse répond : « On ne sait jamais à l'avance où les travaux nous mèneront. »